lundi 19 janvier 2015

L'Auto & Technik museum de Speyer

Il existe en Allemagne deux musées "techniques" qui ont de belles collections dans le domaine aéronautiques, situés à quelques kilomètres l'un de l'autre : il s'agit des musées de Sinsheim et Speyer. Speyer était le second musée sur ma liste : il possède également une collection aéronautique très importante mais aussi la seule navette spatiale soviétique encore en existence à avoir volé : Bourane.

Une navette nommée Bourane...

La visite commence par le pavillon "espace", avec en son centre le clou de la visite : la navette spatiale "Bourane". Un peu d'histoire pour comprendre d'où vient cette navette : au milieu des années 70, les Russes ont voulu concurrencer les américains et leur programme de navette spatiale, en construisant leur propre navette. Il leur faudra 12 années d'efforts, et leur navette, appellée "Bourane" fera un unique vol inhabité mais entièrement automatique en 1988. Le programme sera annulé peu de temps après, lors de la chute de l'Union Soviétique, et la navette qui est partie dans l'espace a été réduite en poussière lorsque le bâtiment d'assemblage où elle était stockée s'est effondré suite au manque d'entretien ! En plus de cette navette, il existait une autre navette appelée "Bourane analogue" ou encore codée OK-GLI. Il s'agkssait d'une navette identique à Bourane, mais conçue pour effectuer des vols atmosphérique pour valider les techniques d'approche et d'atterrissage pour la vraie navette. Cette simili-navette avait même été équipée de quatre moteurs pour pouvoir décoller et voler de manière entièrement autonome. Elle avait effectué pas moins de 25 vols de qualifications, permettant la mise au point du pilote automatique de Bourane.

On peut même visiter la soute de la navette...


Vue de l'arrière de Bourane, avec ses quatre réacteurs qui lui permettait de décoller comme un véritable avion...

Après l'arrêt du projet, elle avait été convoyée pour être exposée en Australie puis à Bahraïn. Elle restera ensuite coincée là-bas plusieurs années, suite à un différent financier entre son propriétaire russe et un consortium singapourien qui devait l'exposer. Le musée de Speyer va contacter les russes et racheter cet appareil…il va s'ensuivre 4 longues années de procès avec les Singapouriens, avant que la justice ne donne enfin raison au musée de Speyer qui va ramener la Navette en Allemagne ! Entièrement restaurée, on peut aujourd'hui la visiter, grâce à la ténacité de l'équipe du musée !
La soute fait la taille d'un  grand bus...

On peut également monter dans la soute, ce qui nous donne une idée de la taille impressionnante de cette navette ! Le gros réservoir vert qui occupe la moitié de la soute est un réservoir de carburant qui alimente les quatre moteurs qui rendent la navette indépendante.

BOR-5

A côté de Bourane, se trouve BOR-5, qui est une maquette de Bourane à l'échelle 1/10, qui avait été conçue pour être équipée de la même protection thermique que Bourane, avant d'être bardée de capteurs et d'être lancée au sommet d'une fusée-sonde et de rentrer dans l'atmosphère. Elle fera 5 vols au total, et l'étude des résultats va permettre de valider la protection thermique de Bourane, constituée de milliers de tuiles thermiques comme la navette américaine.

Encore à côté, se trouve une capsule Soyouz, celle du vol TMA-19. Depuis 1967, Soyouz est la capsule qui est utilisée par les russes pour envoyer des hommes dans l'espace. Il s'agit d'une capsule à trois place…mais quand on voit la place à l'intérieur, on se demande comment trois hommes peuvent passer des heures et des heures à l'intérieur : les trois hommes d'équipages sont allongés sur des couchettes avec les jambes repliées à tel point qu'avec mon mètre 85, j'ai les genoux littéralement dans le menton !

Le troisième étage d'Europa : Astris

Vue du moteur d'Astris

Comme souvent, les plus belles trouvailles sont dans des coins obscurs, et Speyer n'échappe pas à la règle : dans un coin du hangar, avec très peu d'explications, se trouve un étage de fusée, dont le nom m'a immédiatement mis au fait de l'importance de cette découverte : "Astris". Astris était le troisième et dernier étage de la fusée "Europa" qui précéda Ariane, et qui subit 12 échecs sur 12 tirs ! Elle ne parvient jamais à mettre de satellite en orbite, mais les leçons de cette fusée éphémère furent retenues au moment de concevoir celle qui allait devenir célèbre, c'est-à-dire Ariane. Europa se constituait d'un premier étage "Blue Streak" fourni par les britanniques, sur lequel venait l'étage "Coralie" français et enfin le troisième étage fabriqué par l'Allemagne qui accueillait le satellite en son sommet : Astris.

Une réplique grandeur nature du module lunaire d'Apollo..

Le hall possède également une grande exposition consacrée aux missions Apollo et à la conquête de la Lune. On y trouve beaucoup d'objets et de témoignages de ceux qui sont allés sur la lune, dont une réplique du module lunaire d'Apollo, grandeur nature.

Apollo 13 anyone ?


Un autre hall est consacré à l'automobile, ce qui m'intéresse beaucoup moins, mais même dans ce hall on trouve quelques appareils : un Mirage IIIE aux couleurs constructeur par exemple, et aussi un autre appareil rare : un Potez - Heinkel CM-191. Il s'agit d'un appareil dérivé du Fouga-Magister, dont il conserve le fuselage arrière et les moteurs, mais l'avant a été redessiné pour accueillir quatre personnes, comme le "Paris". Il ne sera fabriqué qu'à deux exemplaires, et celui-ci est le numéro 2.

Le CM-191

Un Mirage IIIE bien mis en valeur...

Après ce tour, il me fallait braver le froid pour aller voir les avions exposés à l'extérieur, parmi lesquels on trouve des appareils rares comme l'Antonov 22 ou le Mercure.

F-BTTB, Dassault "Mercure"


On commence par l'extrémité du parc, avec deux appareils qui n'ont pourtant pas grand chose en commun : l'Antonov 26 et le Mercure. Je vous ai déjà parlé du Mercure, tentative de Dassault pour percer sur le marché de l'avion de ligne court courrier, qui a réalisé l'équivalent d'un A320 avant l'heure, mais avec des moteurs consommant trop polluants, qui ne parvient jamais à se vendre, car même le trajet Paris -Nice était trop long pour lui. Il restera ainsi cantonné à des vols intérieurs pour la Compagnie Air Inter, qui va acquérir les 10 exemplaires plus le prototype, et ce sera là toute l'étendue de la production de cet appareil qui pourtant était bien réussi, mais ne répondait à aucun besoin commercial.
Aux commandes du "Mercure"...

L'Antonov 26 est un autre appareil intéressant, c'est un peu le Transall à la russe. Il est développé à partir de l'Antonov 24, un bi-turbopropulseur moyen courrier de transport de passagers. En ajoutant une vaste soute et une rampe de chargement arrière à l'An-24, on obtient un An-26. L'avant de l'appareil contient également une mini-zone pour le transport de passagers ou de blessés, alors que la soute à l'arrière accueille le chargement plus lourd : je suis tombé sur une imposante "Zil" est-allemande à l'intérieur de la soute !

C'est ensuite au tour de l'An-26

Avec une Zil à bord !

Un peu plus loin, on rencontre un tracteur d'avion un peu particulier : le "Plane Transport System 1" ou PTS-1. Il s'agit du premier tracteur d'aion gros porteur conçu sans barre de remorquage : il vient enserrer le train avant de l'appareil pour le tracter et le guider tout à la fois, de manière beaucoup plus efficace qu'avec une barre de remorquage. Ce système peut tracter tous les gros porteurs de l'époque : Boeing 747, DC-10, Tristar etc...

Le PTS-1

On continue ensuite par un monstre : l'Antonov 22 ! Il s'agit d'un quadripropulseurs à hélices contra-rotatives très imposant, conçu dans les années 60 pour transporter les charges lourdes pour le Pacte de Varsovie. Cet appareil possède une vaste soute, un peu à l'image du C-141 "Starlifter" américain, quoique en un peu plus haut et plus large ! Une large rampe de chargement à l'arrière permet aux véhicules de monter à bord, et deux grues mobiles peuvent se déplacer sur toute la longueur de la soute pour déplacer les palettes ou caisses…il n'y a en effet aucun rail sur cet appareil !

L'imposant Antonov-22...

Et ses hélices contra-rotatives...

Vers l'avant, le poste de pilote est organisé autour du puit de train avant : un couloir le longe de part et d'autres pour accéder au logement du "bombardier" à l'avant…je dis bombardier car l'avion à gardé un nez vitré comme les bombardiers, mais c'est en réalité le navigateur qui loge ici. Une échelle permet de monter sur le pont supérieur, où est situé le cockpit ainsi qu'une zone de repos en arrière, avec un astrodôme. Le musée à pensé à surrélever l'astrodome, ce qui permet d'observer le panorama aux alentours, vu que l'Antonov est perché à près de 5 mètres de haut !

Le poste du navigateur...

Et le cockpit principal...

Et l'immense soute...

Il est ensuite temps de monter voir le Boeing 747 ! C'est probablement l'appareil le plus impressionnant à voir, car c'est un Jumbo Jet d'une part, et d'autre part, il est perché à 20m de haut ! On monte par un long escalier qui nous mène sur une plateforme sous l'avion. De là, on peut admirer le train d'atterrissage à multiple bogie de l'appareil, avant de continuer l'ascension jusqu'à la porte arrière du pont passager.

Sous le Boeing-747...

Qui est visible de très loin...

Le train est impressionnant de près...

L'appareil est aménagé un peu de la même manière que le 747 du Bourget : on peut se promener sur le pont passager, dont certaines zones ont été évidées pour montrer le "squelette" de l'appareil, avant de descendre dans la soute ou voir le poste de pilotage. C'est un 747-200, donc l'appareil comporte encore un poste de pilotage analogique pour trois personnes. Différence par rapport au 747 du musée de l'air du Bourget : l'arrière est évidé, ce qui permet d'admirer le "rear pressure bulkhead", le dôme arrière qui limité la zone pressurisée. Pièce essentielle, sa bonne tenue est indispensable au maintient de l'intégrité de l'appareil ! Autre différence : on peut aller se promener sur les ailes, oui, oui, sur les ailes ! Une petite "promenade" est délimitée sur l'aile gauche, et on peut sortir, admirer le 747 de près, ou encore observer la magnifique cathédrale de Speyer à quelques kilomètres de là. La vue est totalement dégagée, et nous sommes le point dominant des environs à bord de cette tour de guet improvisée !

L'arrière du 747 avec la structure primaire...

On peut même se balader sur les ailes !

Le cockpit du Boeing 747

Retour un peu plus bas, pour visite un autre appareil, lui aussi perché au dessus du sol : un Vickers "Viscount", comme à Sinsheim, mais cette fois, aux couleurs de Lufthansa !

On visite ensuite le Vickers "Viscount"

En marge de ces appareils, on trouve aussi une belle collection de chasseurs américains et soviétiques de la Guerre Froide : MiG-21, MiG-23 côté Pacte de Varsovie, et même un Yak-27, appareil ressemblant étrangement au "Vautour" de la SNCASO !

Le MiG-21 au soleil

Le Yak-27, qui ressemble beaucoup au  SNCASO Vautour..


Du côté américain, on trouve un F-101B "Voodoo", deux F-4 "Phantom", dont un aux couleurs des "Blue Angels", la patrouille acrobatique de l'US Navy, ainsi qu'un F-104 "Starfighter" (ou du moins ce qu'il en reste !). On trouve également un F-15 "Eagle", appareil plus moderne que les précédents.

Vue d'un F-104...pour pièces détachées sans doute !

F-101B "Voodoo"

Un F-4 "Phantom" des Blue Angels

F-15 "Eagle" au fond et F-4 "Phantom" devant


Voilà pour la visite du musée de Speyer, un musée impressionnant par la diversité de sa collection, mais aussi par l'originalité de la présentation : le fait de percher les appareils en hauteur permet d'en profiter beaucoup plus que si ils étaient au sol, mais de pouvoir les visiter malgré tout…d'autres musées (surtout ceux en manque de place) devraient s'en inspirer !

Un beau Saab "Draken"

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