lundi 22 décembre 2014

Miracle de Noël pour Pacific Southwest

Le cauchemar des vacances : être coincé dans un aéroports dont plus aucun avion ne peut décoller : en un mot, le piège ! Cette situation devient de plus en plus rare aujourd'hui : les appareils peuvent voler par tous les temps, et la diversité des opérateurs et des vols fait que l'hypothèse d'annulation totale des vols est assez faible, quoique à l'occasion un volcan ou des attentats peuvent précipiter la fermeture d'un espace aérien, mais dans l'ensemble, la météo ne représente plus un risque…mais ce ne fut pas toujours le cas.

Pacific SouthWest ne va pas se laisser arrêter par le brouillard !


Nous allons donc remonter le temps, au moment des vacances de Noël de 1962 aux Etats-Unis. L'un des aéroports les plus usités des Etats-Unis, celui de San Francisco, est en plein milieu d'une crise : tout le terrain est enveloppé d'un brouillard redoutable, tellement épais "qu'une balle de baseball lancée par quelqu'un donne l'impression de disparaître dans le néant"…et bien sûr plus aucun vol ne peut partir ou arriver : l'aéroport est fermé, mais pire encore, le brouillard va persister presque toute la semaine de Noël et les passagers sont coincés dans le terminal en attendant de pouvoir un jour rentrer chez eux…sauf les passagers de la Pacific Southwest Airlines ou PSA !

Chômage technique avec ce brouillard...mais pas pour tout le monde !


Les responsables de la PSA, voyant le mauvais temps arriver décident d'agir pour ne pas se retrouver coincés à San Francisco : il se trouve que si le grand aéroport va être complètement bloqué, l'aéroport de Half Moon Bay, situé de l'autre côté de la baie de San Francisco, est totalement dégagé,et par chance, il peut acceuillir les appareils de la PSA : le L188 "Electra" (la version civile du Lockheed P-3 "Orion" de lutte anti sous-marine). Half Moon Bay est un petit aéroport régional qui ne possède pas de terminal ni même de tour de contrôle, mais il y fait beau, et c'est mieux que rien; décision est prise par la PSA de déplacer toutes ses opérations aériennes là-bas.

Un "Super Electra" de PSA, vu dans des conditions plus clémentes...


Dans l'heure qui suit, la compagnie affrète une flotte de 32 bus pour faire la navette entre l'aéroport de San Francisco et le nouvel aéroport, et dans le même temps, la compagnie envoie ses contrôleurs, dispatcheurs et techniciens directement sur place, alors que les grandes compagnies ne peuvent pas faire de même : le petit aéroport ne peut pas accueillir les grands jets !

Half Moon Bay est un petit aéroport qui ne possède qu'une unique piste...


Les "Electra" commencent ainsi à se poser à Half Moon Bay, mais il faut faire vite : les taxiways ne sont pas suffisamment résistants pour accueillir les Electra, ils doivent donc rester sur la piste principale. Rapidement la méthode se met au point : les passagers attendent en bout de piste, et les appareils qui se posent font demi-tour en bout de piste, laissant descendre leurs passagers par l'avant, tout en embarquant les nouveaux par l'arrière, idem pour les bagages, pendant que les pétroliers ravitaillent l'appareil ce qui permet un Turn Around Time d'à peine une demi-heure ! L'appareil redécolle dès qu'il est prêt, laissant le champ libre pour le prochain appareil !

Idem, il faut improviser pour faire de Half Moon Bay un aéroport fonctionnel : le terrain ne possède pas de tour de contrôle, mais qu'importe : les contrôleurs montent sur le toit d'un hangar, avec des radios portatives, et ils vont mettre au point une tour de contrôle locale pour gérer les mouvements sur la piste ! Le hangar étant lui-même transformé en terminal temporaire, à même d'accueillir et d'enregistrer les passagers, grâce à la débrouillardise du personnel au sol qui va positionner des barrières et des tables pour faire des comptoirs improvisés. Devant l'afflux de passagers et le manque de moyens, certains employés vont devoir travailler 24 ou 36 heures d'affilés ! Pendant ce temps là, un petit hôtel en face de l'aéroport est réquisitionné et permet aux pilotes ayant dépassés leurs horaires de pouvoir se reposer au chaud.

Les Electra sont les seuls appareils à pouvoir se poser...


Un renfort viendra des forces de police locales qui vont isoler l'aéroport pour s'assurer que rien ne vienne perturber le trafic, et après quelques jours d'opérations, les passagers se présentent spontanement à Half Moon Bay pour prendre leurs vols. Pacific Southwest va également créer de la publicité et faire des annonces à la radio en annonçant que "Pacific Southwest vous ramène chez vous pour Noël !"

Ce sera le "miracle de Noël"


L'opération va durer du 14 décembre jusqu'à Noël où le brouillard va se lever progressivement sur l'aéroport de San-Francisco, permettant un retour à la normal des opérations aériennes. Le petit aéroport de Half Moon Bay aura en tout vu passer pas loin de 40 000 passagers, qui pourront rejoindre les aéroports de Burbank, Los Angles et San Diego, où les conditions sont plus favorables et permettent aux passagers de prendre des correspondances avec d'autres vols. Ainsi est née la "légende de Half Moon Bay", deux semaines d'opérations intensives depuis un aéroport qui n'avait pas été conçu pour cela, grâce au dévouement et au professionnalisme de tout le personnel de Pacific Southwest Airline qui se dépensèrent sans compter pour s'assurer que leurs 40 000 passagers puissent arriver chez eux à temps pour Noël ! En tout, ce n'est pas moins de 488 vols qui seront assurés malgré la précarité des conditions sur site. Pendant plusieurs semaines, PSA recevra chaque jour plusieurs centaines de lettres de passagers reconnaissant de leur avoir permis de "sauver leur Noël" !

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